Magicien micro-entrepreneur ou intermittent : quel statut choisir ?

Ça y est, vous souhaitez vous lancer comme magicien professionnel. Vous avez peut-être encore un travail à côté, ou peut-être quittez-vous tout pour ne vivre que de votre art. Oui mais voilà, alors que vous sautez le pas dans le grand bain une question vous taraude : quel statut choisir pour mon activité ? Celui d’intermittent ? Avoir une micro-entreprise ? Et puis, quels sont les avantages et les inconvénients de chacun de ces deux statuts ?

Vous ne savez plus où donner de la tête et vos recherches internet vous expliquent tout et son contraire ? Pas de panique, on reprend tout depuis le début pour bien comprendre les enjeux !

PS : n’hésitez pas à lire aussi notre article sur Comment devenir magicien professionnel.

Pourquoi se déclarer en tant que magicien professionnel ?

Si vous êtes sur cette page, c’est que l’idée de vous déclarer comme professionnel vous a au moins traversé l’esprit, et c’est une bonne chose ! Tout d’abord, commençons par un point légal important : tout travail doit être déclaré. Un point c’est tout, sinon vous risquez gros, et pas que financièrement !

Bien que l’on soit tous passés par là à commencer timidement à faire ses premiers tours de magie dans les repas de famille (et pour cela nul besoin d’entreprise), la formalité devient en revanche obligatoire si l’on est employés par quelqu’un, d’autant plus si l’on est rémunérés.

La première raison est qu’en vous déclarant, vous serez redevable de cotisations, ces mêmes cotisations qui font que la France permet à un grand nombre de personnes d’accéder à des soins, de payer des retraites, de financer des bâtiments publics, des routes, des écoles et j’en passe. Ainsi, se déclarer permet de contribuer à l’effort collectif.

Mais si vous ne le faites pas par conviction, les chiffres peuvent vous en dissuader. Le travail dissimulé (aussi appelé travail au noir) est constitue une infraction prévue par l’article L8221-1 du Code du travail. Cet article prévoit une amende pouvant aller 45 000 euros pour la personne travaillant au noire, et jusqu’à 225 000 euros pour l’entreprise qui emploie cette même personne sans la déclarer. Cette sanction peut être liée ou non à une peine de prison, voire à des interdictions d’exercer certaines activités professionnelles en cas de récidives.

Un autre aspect qui fait que se déclarer comme professionnel est important est la protection qui vous est accordée. En effet, lorsque vous êtes déclaré, vous participez comme nous l’avons vu à l’effort collectif, mais cet effort est à double sens. Il est aussi là pour vous aider en cas de pépin ! Si vous tombez malade et êtes incapable de travailler ou si vous vous retrouvez au chômage, les cotisations peuvent dans certains cas vous sortir de ce pétrin.

Attention, comme nous le verrons il ne suffit pas de se déclarer comme professionnel pour bénéficier automatiquement de tout cela.

Se protéger est important, mais on serait presque amenés à dire que cela nous regarde. Cependant, vous risquez de sérieux ennuis si la personne blessée ou lésée n’est pas vous, mais une personne tierce ! Imaginez que vous blessiez par inadvertance un spectateur lors de votre spectacle (un accident est vite arrivé, surtout avec les artifices pyrotechniques utilisés en magie), vous seriez bien embêté de devoir payer vous-même les dommages et intérêts liés à cet accident.

Enfin, lorsque vous cotisez, vous payer la retraite de vos ainés, et la génération en dessous de vous paiera votre retraite. Cette retraite méritée sera proportionnelle à ce que vous aurez déclaré comme revenus à la fin du mois.

Aussi, si vous souhaitez profiter de vos vieux jours et vivre tranquille, mieux vaut ne pas oublier de déclarer vos gains…

Quel statut choisir ? 

Lorsqu’un magicien souhaite se professionnaliser, il doit choisir un statut juridique qui correspond à son activité. En France, plusieurs options s’offrent à lui : l’intermittence du spectacle, ou créer une micro-entreprise. Chaque statut a ses avantages et ses inconvénients, et le choix dépend du type de prestations réalisées, du volume d’activité et des besoins personnels du magicien comme nous allons maintenant le voir.

Le statut d’intermittent du spectacle

L’intermittence est un régime spécifique aux artistes et techniciens du spectacle vivant, du cinéma et de l’audiovisuel. Pour un magicien, ce statut est possible s’il travaille régulièrement pour des entreprises du spectacle (théâtres, agences événementielles, productions audiovisuelles, etc.).

Les avantages de ce statut sont multiples :

✔️Accès à l’assurance chômage

Le principal avantage de l’intermittence est de pouvoir percevoir une indemnisation chômage entre deux contrats, à condition de remplir les conditions d’heures travaillées (507 heures en 12 mois). Ainsi, si vous réalisez votre nombre d’heures (on peut également parler en cachets) dans l’année, vous aurez l’année suivante une indemnisation en conséquence. Ce système permet une plus grande stabilité financière, surtout dans un métier où les contrats peuvent être irréguliers.

✔️Vous pouvez avoir plusieurs employeurs

A moins qu’un contrat ne le mentionne explicitement, il est possible pour le magicien de cumuler plusieurs employeurs. Vous pouvez ainsi tout à fait être le magicien de plusieurs agences évènementielles en même temps sans que cela ne pose de problème.

✔️Parfois cela sera demandé

Parfois, certaines manifestations passeront par des agences pour trouver un magicien, ces mêmes agences qui ne travailleront qu’avec des magiciens sous le statut d’intermittent. Dans ces cas là, et si vous souhaitez travailler avec elles, vous devrez vous déclarer comme intermittent du spectacle.

✔️Pas de gestion comptable complexe

Au niveau administratif, l’intermittence est relativement simple à gérer. Vous aurez essentiellement à déclarer vos gains à votre Pôle Emploi, mais la gestion des cotisations sociales et ce qui en découler est normalement géré par votre employeur. Ce sera donc à lui de faire ces déclarations et procédures administratives.

✔️Une protection sociale avantageuse

En tant qu’artiste intermittent du spectacle, vous dépendez du régime général de la sécurité sociale et êtes par conséquent affilié à la caisse d’assurance maladie de votre lieu de résidence. Vous avez donc droit aux prestations des assurances maladie, maternité, invalidité, décès, accidents du travail et maladies professionnelles, sous réserve de remplir les conditions d’ouverture des droits applicables aux salariés.

✔️Une aide des agences

En général, l’intermittent du spectacle recevra ses contrats d’une agence évènementielle. Dans ces cas là, la tâche de trouver de potentiels clients (c’est-à-dire de prospecter) sera déléguée à l’agence elle-même. Vous n’aurez besoin que de faire votre prestation et d’être payé pour cela. Évidemment cela ne fonctionne que si vous avez votre agence qui vous remplit tout votre calendrier, ce que l’on vous souhaite…

Voici à l’opposé les inconvénients de l’intermittence :

Accès au statut difficile, surtout au départ

En effet, pour obtenir le statut, il faut réaliser 507 heures de travail en 12 mois. On parle en général de cachets pour regrouper les plages de 12 heures. Ainsi, il vous faudra environ 43 représentations par an pour vous assurer le maintien de vos avantages. Cette valeur est approximative, car si l’on rentre dans le détail vous pouvez faire compter plus d’un cachet par « représentation », mais cela donne un ordre d’idée du travail qu’il vous faudra accomplir, et des contrats qu’il vous faudra trouver sur une année. Pensez bien à prévoir les « périodes creuses » qui pourraient vous faire risquer de ne pas atteindre le quota et donc de perdre vos droits.

Vous dépendez de votre employeur

Un magicien intermittent ne peut pas facturer directement ses prestations. Il doit être embauché par un producteur ou une agence qui gère son contrat et l’administratif qu’il y a autour. Cela peut être contraignant pour ceux qui veulent vendre leurs services librement (magie de close-up en entreprise, mariages, anniversaires, etc.) puisqu’ils doivent forcément passer par l’agence, qui en plus d’être un intermédiaire prendra une commission, ce qui fera forcément baisser votre rémunération (ou augmentera le prix de la prestation payée par le client).

Le statut de micro-entrepreneur

Le statut de micro-entrepreneur (anciennement auto-entrepreneur, les deux termes désignent donc la même chose) permet à un magicien de proposer ses services librement et de facturer ses prestations. Il est l’un des statuts le plus simple et le plus sollicité. Fin juin 2024, on recensait pas moins de 2,971 millions de micro-entreprises d’actives sur le territoire français (tous corps de métier confondus, et pas seulement les magiciens, évidement !). La grande liberté de ce statut et sa facilité de gestion lui confèrent un grand nombre d’avantages.

Les avantages de la micro-entreprise :

✔️Grande autonomie

Le micro-entrepreneur conserve son autonomie et n’a pas besoin d’une structure comme une agence évènementielle pour se faire embaucher. Il peut ainsi démarcher directement les restaurants, entreprises ou les particuliers pour proposer ses services.

✔️Simplicité administrative

En France, le statut de micro-entrepreneur est certainement l’un des plus simple qui soit. La création de l’entreprise ne dure pas longtemps et les informations demandées sont tout ce qu’il y a de plus classique. De nombreuses plates-formes en ligne (Shine, LegalPlace, …) proposent par ailleurs de s’occuper intégralement des formalités d’immatriculation moyennant finance. Cela peut être un bon moyen de créer son entreprise sans prise de tête. L’avantage de la micro-entreprise est aussi qu’elle ne possède pas de capital social, ce qui veut dire que vous n’avez pas de minimum à injecter dans votre entreprise pour la lancer, au contraire d’autres statuts comme les SAS, EURL par exemple (même si le capital demandé dans ces cas là est symbolique). De la même façon, il ne sera pas obligatoire (du moins au départ) d’avoir un compte professionnel payant dédié en banque.

Enfin, au niveau du quotidien, vous devrez maintenir un cahier d’écritures comptable qui n’a rien de très complexe. Pour ce qui est des déclarations mensuelles (ou trimestrielles selon votre choix) vous n’aurez littéralement que trois cases à remplir sur le site de l’URSSAF. C’est tout !

✔️Possibilité de cumuler avec un emploi ou un autre statut

Un intermittent peut être aussi micro-entrepreneur pour facturer des prestations qui ne rentrent pas dans l’intermittence (anniversaires, mariages, formations, vente de matériel magique, etc.). Vous n’êtes donc pas contraint par ce statut.

✔️ Seuils de chiffre d’affaires adaptés aux artistes indépendants

Le plafond de chiffre d’affaires est fixé (en 2024), à 77 000 euros pour les prestations de services, ce qui permet un bon développement sans changer de régime fiscal immédiatement.

Les inconvénients du statut de micro-entrepreneur :

Pas d’assurance chômage

Par défaut, et à moins de souscrire à une assurance complémentaire spécifique, si vous vous retrouvez sans travail, vous ne toucherez pas le chômage que peuvent percevoir les intermittents en échange de leur nombre d’heures par an. Vous devrez donc soit vous assurer d’avoir assez d’économies pour parer toute éventualité, ou bien souscrire à une assurance complémentaire.

Charges sociales et impôts sur le chiffre d’affaires

Dès le premier euro de gagné en chiffre d’affaires, vous devrez le déclarer, et vous aurez des cotisations sociales et de l’impôt à payer sur ce chiffre d’affaire. Cela signifie que vous ne pouvez pas déduire de charges ni de TVA* en micro-entreprise. Pour vous donner un ordre d’idée, les cotisations sociales sont de l’ordre de 22% sur votre chiffre d’affaires pour les prestations de services, ce à quoi il faut ajouter par la suite les impôts.

* Pour le sujet de la TVA il existe des seuils en micro-entreprise, mais cela ne nous intéresse pas ici.

Moins adapté au monde du spectacle

Nous devrions plutôt dire « statut moins adapté aux grandes productions » comme les théâtres, les télévisions, etc. En effet ces entités embauchent plus facilement des intermittents que des micro-entrepreneurs sur facture (bien que ce ne soit évidemment pas une généralité et que rien ne les en empêche). La micro entreprise est surtout adaptée aux particuliers ou aux petites structures qui ne sont pas du monde du spectacle comme la restauration par exemple. 

Alors finalement, quel statut choisir ?

Et si on faisait un petit tableau pour résumer ?

CritèreIntermittentMicro-entrepreneur
IndépendanceDépendant des employeursLiberté totale
Type de clientsThéâtres, agences, productionsParticuliers, entreprises, événements
Sécurité financièreAccès au chômagePas d’indemnisation chômage
Fiscalité et chargesCharges payées par l’employeur22% de cotisations sociales
Simplicité administrativeSuivi des heures, contrats à signerGestion simplifiée
Protection socialeBonne couverture socialeMoins avantageuse
Accès au statutDifficulté à atteindre 507h/anFacile à créer

En résumé :

Si vous travaillez pour des théâtres, productions TV ou festivals :

➡ Le statut d’intermittent est plus avantageux car il permet d’être salarié et d’accéder à des indemnités chômage. Il vous sera souvent demandé dans ce type de prestations. Vous n’aurez pour ainsi dire aucune paperasse administrative à gérer, vous toucherez un chômage les jours où vous ne travaillez pas mais devrez faire vos 507 heures par an.

Si vous proposez des prestations privées (mariages, entreprises, restaurants) :

➡ Le statut de micro-entrepreneur est plus adapté car il permet de facturer librement.

A savoir : certains magiciens choisissent de cumuler les deux statuts : intermittent pour les spectacles et micro-entrepreneur pour la vente de produits magiques ou les prestations privées. Cela permet de bénéficier des avantages des deux systèmes.

Attention, les information présentes ici sont uniquement là à des fins d’information. Nous vous recommandons de les vérifier par vous-même car elles sont susceptibles d’évoluer.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *